31/01/2008

Pooneil, Godard, les flics et la chanteuse

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Jefferson Airplane - House at Pooneil Corners, Manhattan Rooftop Concert, 1968
Mis en ligne par familiareal


Le 1er Novembre 1968 Jean-Luc Godard (qu'on peut voir à la fenêtre dans un des premiers plans), D. A. Pennebaker et Richard Leacock donnent rendez-vous au Jefferson Airplane pour un concert non autorisé sur le toit du Schuyler Hotel, 57 West 45th Street, New York. Il tournent un film politique qu'il veulent intituler 1 A.M. (One American Movie). Le sujet, c'est le soulèvement en cours de la jeunesse états-unienne, à ce titre ils tiennent à y faire figurer l'Airplane, qui chante Somebody to love et The house at Pooneil corner, seul morceau à être filmé.


You & me we keep walkin' around & we see,
All the bullshit around us,
You try & keep your mind on what's going down,
Can't help but see the Rhinoceros around us,
& you wonder what you can do?
& you do what you can
To get Bald & Hi(gh)
& you know I'm still goin' need you around...
You say it's healing but nobody's feeling it
Somebody's dealing - somebody's stealing it,
You say you don't see & You Don't,
You say you won't know & you won't. Let it come.
Everything someday will be gone except silence.
Earth will be quiet again.
Seas from Clouds will wash off the Ashed of Violence
Left, as the memory of Men.
There will be no survivor my friend.
Suddenly everyone will look surprised.
Stars Spinning-Wheels in the skies.
Sun is scrambled in their eyes,
While the moon circles like a vulture.
Someone stood at a window & cried.
'One tear I thought that should stop a war.
But someone is Killing me'
& that's the last hour to think anymore.
Jelly & juice & bubbles - bubbles on the floor.
Castles on the cliffs vanish.
Cliffs, like heaps of rubbish
Seen from the stars, hour by hour,
As splintered scraps & black powder
From Here to Heaven is a scar.
Dead center - Deep as Death.
All the idiots have left.
Epitaph:
The cows are almost cooing,
Turtle doves are mooing,
Which is why a poo is pooing
In the Sun...



La police intervient avant le troisième morceau, qui devait être Crown of creation.


The house at Pooneil Corner est une chanson "miroir" de The Ballad of you and me and Pooneil. The Ballad... c'était le premier morceau de ce disque, After bathing at Baxters.




Ce qui veut dire que pour une bonne partie de ma génération la formule du petit déjeuner se composa plusieurs mois durant de cette musique et d'un bol de Nescafé.

Et si vous voulez savoir Why a poo is pooing, sachez que cela fait référence à Winnie the Pooh. Winnie l'ourson, quoi. C'est pourquoi il ne faut pas chercher sur une carte Pooneil corner, qui est à l'intersection de Winnie the Pooh et de Fred Neil, le folksinger maudit.

Peu après cette journée de tournage, Godard quitte l'équipe pour une virée au Québec. Quand il revient à New-York il juge que les rushes tournés par le duo Pennebaker/Leacock ne correspondent pas à son projet et il se brouille avec eux. Ce qui reste du film sera repris par Pennebaker sous le titre de 1 P.M. (One parallel Movie) ou, comme Godard l'a rebaptisé, "One Pennebaker Movie". On peut retrouver cet épisode décrit chez Anne Wiazemsky (Un an après, Gallimard éd. 2015, pp. 164-165).

29/01/2008

La grande course aux signatures de 1840, ou l'histoire des quatre capitaines (le voyage de Meryon #6)

La péninsule de Banks vue de l'est, de nos jours.
La rade la plus profonde, sur la côte sud à gauche, est celle d'Akaroa.
Au fond à droite sur la côte nord on aperçoit l'entrée de la rade de Port Cooper/Lyttleton Harbour.
Un peu plus près à l'ouest, légèrement cachée, on discerne l'entrée de Pigeon Bay. A l'horizon, la ville de Christchurch.

Le Comte de Paris quitte Rochefort en Mars 1840 sous le commandement du capitaine Langlois, avec à son bord 66 colons volontaires - 57 français et 9 allemands. L'Aube, le navire de guerre du capitaine Lavaud qui doit le protéger, a quitté Brest le 19 Février. Mais avant qu'ils parviennent en Nouvelle-Zélande bien des choses se seront passées.

La pénétration a jusqu'alors suivi les étapes classiques des installations européennes du Pacifique : d'abord les aventuriers, déserteurs des équipages de baleiniers et de pêcheurs de phoques, bagnards échappés d'Australie, trafiquants d'armes, de poudre et d'alcool - et les missionnaires protestants et catholiques. On estime à deux mille les colons d'origine anglaise ainsi installés au début de 1839. En même temps une économie de type marchand se diffuse dans les îles à travers le commerce du mousquet, du bois, du lin et l'activité des stations baleinières. L'inégalité des termes de l'échange - des biens manufactués, rares pour les Maoris, contre des terres abondantes - redouble classiquement celle des moyens militaires.

Ensuite, viennent les sociétés de colonisation : en 1833 la tentative avortée d'une première New Zealand Company, puis la réussite de la seconde dont le premier navire, le Tory, quitte les côtes anglaises le 12 Mai 1839.

Les premières cessions de terres se font dans l'ignorance mutuelle du droit et des coutumes spécifiques à chacune des parties, anglaise et maorie. Or ces règles sont bien différentes - par exemple chez les Maoris certaines cessions de terrains, effectuées par des individus, sont en fait soumises à l'autorisation de la collectivité, exprimée par le biais de ses chefs. De plus, des terres qui "appartiennent" à un groupe peuvent également être grevées de droits détenus par des groupes plus lointains - tout cela découlant d'un droit foncier coutumier complexe, dépendant d'un système de répartition entre groupes et sous-groupes - Waka, Iwi et Hapu (1) - système opaque aux nouveau-venus occidentaux. De leur côté ces derniers établissent des actes de vente qui les favorisent sans trop de scrupules, les transcrivant dans une langue non maîtisée par les Maoris. Il en résultera des litiges interminables que le tribunal de Waitangi travaille encore aujourd'hui à désenchevêtrer, et qui seront la source des conflits sanglants de la seconde moitié du XIXème siècle.

Le camp européen a ses contradictions. Les missionnaires, notamment Henry Williams, comprennent que la pression économique finira par exproprier les tribus et les pousser à la violence; ils se lancent dans une campagne contre la NZ Company, qui de son côté exhortera les colons à se gouverner eux-mêmes, par crainte de voir la Couronne prendre des mesures pour protéger les Maoris. Le Colonial Office, qui dispose d'un nombre limité de vaisseaux de guerre dans cette partie de l'Océanie - tout au plus les HMS Britomart, Herald et Pelorus - est pris entre la menace d'une révolte maorie si on laisse le champ libre aux immigrants, et sa répugnance à annexer le territoire sans avoir les moyens de le contrôler. Aussi la Couronne n'a toujours pas proclamé l'annexion de la Nouvelle-Zélande, se contentant d'envoyer en 1833 un "résident", James Busby, pour négocier avec les chefs Maoris.

C'est à la mi-1839 que les événements se précipitent. En Septembre la NZ Company va faire partir trois convois d'émigrants sur l'Oriental, l'Aurora et l'Adelaïde, dans la plus stricte illégalité vis-à-vis des autorités anglaises. Lord Normanby, chef du Colonial Office, se résoud à dépêcher sur place l'énergique capitaine William Hobson, avec le titre de "lieutenant-gouverneur de tout territoire sur lequel Sa Majesté détient ou peut détenir la souveraineté en Nouvelle-Zélande" et les missions :

  • de traiter avec les Maoris de façon à ce qu'ils reconnaissent la souveraineté de la couronne britannique, car "la Reine, comme son prédécesseur, décline pour elle-même comme pour ses sujets toute prétention à s'emparer des îles de Nouvelle-Zélande, ou à les gouverner comme une partie des Dominions de Grande-Bretagne, sauf à obtenir préalablement le consentement libre et éclairé des natifs, exprimé selon leurs usages. Croyant cependant, que leur propre bien-être serait, dans les circonstances que j'ai décrites, mieux promu par la remise à Sa Majesté d'une souveraineté maintenant si précaire et guère plus que nominale, et persuadée que les bénéfices tirés de la protection britannique et des lois administrées par des juges britanniques feraient bien plus que compenser le sacrifice par les natifs, d'une indépendance nationale qu'ils ne sont plus capables de préserver, le gouvernement de Sa Majesté a résolu de vous autoriser à traiter avec les aborigènes de Nouvelle-Zélande pour la reconnaissance de la souveraineté de Sa Majesté sur tout ou partie de ces îles qu'ils pourraient souhaiter placer sous son autorité" (2)
  • de faire en sorte, avec l'accord des chefs Maoris, qu'aucune terre ne soit plus vendue sauf à la Couronne, et en conséquence de proclamer qu'aucun titre de propriété ou acte de vente passé ou à venir ne sera reconnu valide que s'il est assorti d'une concession de la Couronne (Crown grant) (3).



Carte de la Nouvelle-Zélande, 1832

Mais une fois ces instructions connues à Paris, une campagne se déchaîne - sans doute à l'instigation des investisseurs qui formeront une première compagnie de colonisation mort-née, puis, à la fin de l'année, la Nanto-bordelaise - pour que la France prenne sa part de Nouvelle-Zélande. C'est après une quarantaine d'articles dans les journaux français, et une pétition de la Chambre de Commerce (4) que le roi et le gouvernement donneront leur accord pour l'expédition navale.

En retour bien sûr l'agitation française, puis les préparatifs de l'Aube et du Comte de Paris ne restent pas inaperçus des autorités anglaises. Normanby et Hobson savent donc qu'ils devront faire face à une double crise, intérieure avec la NZ Company et extérieure avec la marine de Louis-Philippe, active dans le Pacifique puisqu'au même moment à Tahiti les pasteurs de la London Missionary Society (LMS) sont confrontés à Dupetit-Thouars (un escorteur de baleiniers, lui aussi...)

Hobson arrive à la Baie des îles le 29 Janvier 1840 et signe le 6 Février le traité de Waitangi avec 46 des principaux chefs Maoris de l'île du Nord - à terme les chefs signataires seront 512. Le 21 Mai il proclame la souveraineté de la Couronne anglaise, sur l'île du Nord en vertu du traité et sur l'île du Sud par droit de première découverte par le capitaine Cook. Mais pour conforter les droits anglais, le 25 Avril il envoie au sud le major Bunbury (à cette date Hobson est atteint de paralysie) à bord du HMS Herald pour négocier si possible la signature du traité de Waitangi par les chefs maoris locaux.


Le voyage du Major Bunbury, Mai-Juin 1840
extrait du Ngai Tahu land report, Tribunal de Waitangi

Hobson croyait les Maoris du Sud incapables "de par leur ignorance de conclure en connaissance de cause un traité avec la Couronne". Bunbury, tout au contraire, trouva des chefs qui pour certains entendaient suffisamment d'anglais et étaient en tout cas disposés à croire, comme ceux du Nord, qu'ils signaient de puissance à puissance et que cela valait mieux que d'être "découverts" comme de bons sauvages. En une quinzaine de jours, il reçoit l'accord de quatorze chefs à Ruapuke, Otaku, Akaroa (Tikao, dont Meryon fera le portrait, est parmi les signataires) et Cloudy Bay, où il proclame en conséquence la souveraineté anglaise saluée le 17 juin par vingt et un coups des canons du Herald.

Ignorant de ces événements, Langlois jette l'ancre du Comte de Paris le 9 Août à Pigeon Bay sur la côte nord de la péninsule de Banks. Il invite à bord des chefs Maoris et leur fait signer des actes de vente en blanc. Les négociations se font en anglais, avec un interprète Maori local, et Langlois écrira les actes de vente en français quelques jours plus tard à Akaroa. Le premier des actes transfère à la Nanto-bordelaise la propriété de la péninsule de Banks en contrepartie d'un paiement en marchandise dont ni la liste ni la valeur ne sont spécifiées, bien qu'il soit admis que cette valeur était supérieure aux 850 francs qui restaient à devoir sur le contrat de 1838. Le second acte porte sur la vente d'une étendue de terrain beaucoup plus importante, plus du tiers de l'île sud, de la côte ouest à la côte est, depuis Kaikoura au nord à Te Waiteruati (aujourd'hui Temuka) au sud, pour 120.000 Francs payables en cinq fois sur dix ans, le premier paiement étant effectué le 24 août à Akaroa en marchandises. Le contenu de ces deux actes, particulièrement l'étendue des terres cédées, sera par la suite contesté par les Maoris.

De son côté l'Aube, le navire de guerre du capitaine Lavaud, mouille le 10 Juillet à la Baie des Iles où le capitaine Hobson l'informe que l'île du sud étant désormais sous souveraineté anglaise tout nouvel achat de terres par des Européens sera considéré comme nul par le Colonial Office, et que les achats antérieurs devront être confirmés par les land commissioners anglais. Il semble bien que Lavaud et Hobson soient arrivés alors à un accord provisoire : "Fondamentalement Lavaud ne devait rien faire qui pourrait remettre en cause les droits des britanniques à la souveraineté sur l'Ile du Sud, tandis que ceux-ci, autoriseraient non seulement les colons français à débarquer et à s'installer sur les terres que Langlois avait achetées, mais s'engageaient aussi à n'entreprendre aucune action qui puisse porter atteinte à l'autorité de Lavaud sur ces mêmes colons... Le drapeau français ne devait pas être arboré comme un signe de revendication française" (5). Le 22 Juillet Hobson dépêche un navire de guerre, le Britomart, capitaine Stanley, avec deux magistrats à son bord, pour surveiller l'arrivée des navires français et établir un tribunal britannique à Akaroa en signe de souveraineté. Lavaud lui-même ne quittera la Baie des Iles que le 27.





Vues du ciel, la pénisule de Banks et la rade d'Akaroa

Le commandant de l'Aube fait alors voile vers Akaroa, qu'il atteint le 15 août, mais il a été précédé de cinq jours par le Britomart. Stanley a affronté plusieurs jours de tempête, perdu deux barques et plusieurs de ses voiles, mais il est arrivé bon premier. La "course à Akaroa" fait depuis lors partie du mythe fondateur de la colonie de peuplement de la Nouvelle-Zélande, avec le traité de Waitangi, cette merveille de double langage. Le mythe a même son côté romanesque - Lavaud serait tombé amoureux de Mme Hobson et lui aurait livré le secret de sa mission... En fait on a vu qu'il connaissait depuis la Baie des Iles la faiblesse de sa position et la mission du Britomart ne faisait que confirmer la proclamation de Bunbury, que les Français trouveront placardée à leur arrivée à Akaroa.

Lavaud a croisé le baleinier français Pauline qui, abordant à Port Cooper, informe Langlois que l'Aube est à Akaroa, l'empêchant du même coup de pproclamer la souveraineté française (6) ce qui aurait provoqué un incident diplomatique. Le Comte de Paris part immédiatement rejoindre l'Aube et arrive le 17 Août à Akaraoa pour recevoir la visite d'une barque du Britomart portant les magistrats britanniques, et découvrir que la loi anglaise est censée désormais s'appliquer dans la petite colonie. Langlois rédige les contrats signés à Pigeon Bayen les antidatant des 11 et 12 Août, c'est-à-dire avant qu'il ait eu vent de la souveraineté revendiquée par Hobson.


Cette souveraineté anglaise, Lavaud ne l'a évidemment pas reconnue, mais on a vu qu'en même temps il s'est mis d'acord avec Hobson pour ne pas la défier. Il garde des relations courtoises avec Stanley qui ne fait pas flotter le pavillon britannique sur Akaroa, permettant ainsi au commandant de l'Aube de conserver son autorité sur les colons français à terre. La guerre du Pacifique n'aura pas lieu; l'heure est venue des contacts diplomatiques pour débrouiller les revendications des deux parties, qui disposent chacune de documents à faire valoir et de canons sur place. Les entretiens vont commencer entre le chargé d'affaires de Louis-Philippe à Londres et Lord Aberdeen.


Et maintenant qu'il est à pied d'oeuvre Lavaud découvre toutes les faiblesses des contrats de Langlois, y compris ceux de 1838, signés à Port Cooper par des Maoris de tribus différentes de celles d'Akaroa. Il prend connaissance de revendications d'autres européens, notamment Hempelman, et des français Cafler et Ratau qui avaient eux aussi "acheté" la péninsule de Banks. "Tout ce dédale m'a prouvé que les naturels ont été trompés par les acquéreurs, qui ont écrit eux-mêmes leurs contrats, en y mettant plus que moins, mais que plus tard, ceux-ci s'en apercevant, ont vendu à plusieurs la même portion de terre, pour laquelle chacun vient aujourd'hui étaler ses prétendus droits; néanmoins, je suis fortement porté à croire, que pas un des contrats que j'ai vu jusqu'ici, n'est rédigé de bonne foi" (7). Lavaud sait aussi que les Anglais ne reconnaîtront pas, même s'ils sont antidatés, les contrats apportés de Pigeon Bay par Langlois. Il lui demande donc de rédiger un document entièrement nouveau, antidaté cette fois de 1838, que Langlois signe un peu plus tard avec des chefs Maoris du nord de la péninsule et d'Akaroa. Le père Comte, missionnaire français, sert d'interprète et trois officiers de l'Aube de témoins. Le contrat transfère à Langlois la totalité de la Péninsule sans préciser la limite occidentale des terres cédées et à l'exception d'une portion qui devient réserve Maorie, cela pour un montant de 6.000 francs au lieu des 1.000 initialement prévus, les marchandises correspondantes à livrer aux Maoris étant maintenant listées. Comme pour les autres contrats, les termes de celui-ci seront contestés par les Maoris; il sont aussi mis en doute, selon Peter Tremewan, par certains Français comme Belligny, représentant sur place de la Nanto-bordelaise, pour qui le contrat n'aurait porté en réalité que sur le port d'Akaroa, en plus des terres déjà achetées par Langlois à Port Cooper et Pigeon Bay. Et pour les Maoris les terres vendues à Akaroa se limitaient à celles occupées par les colons français.


Pendant ce temps les colons du Comte de Paris sont dans des tentes, par le froid rigoureux de l'hiver Néo-Zélandais. Lavaud et Belligny d'un côté, le capitaine Stanley et les deux magistrats anglais de l'autre délimitent 3.000 acres (1.200 hectares) de terrain dans la baie de Pala Akiri, pour y installer les immigrants : 5 acres par homme adulte, deux et demi par enfant de 10 à 15 ans. Comme il n'y a pas assez de place pour tous, on regroupera les Allemands un peu plus loin à Takamatua - et je ne peux m'empêcher de penser que ces pauvres gens que la misère a poussés là doivent grandement ressembler à mes arrière-arrière-grands-parents, n'était-ce le hoquet de l'histoire qui les a projetés aux antipodes. Ils y feront souche, devenant de loyaux sujets de Sa Majesté, et aujourd'hui encore certaines rues d'Akaroa portent des noms français.


Quand la Nanto-bordelaise, en France, apprend que l'Angleterre revendique la souveraineté sur l'île du sud, elle cesse d'envoyer des colons et prend dès 1841 des contacts à Londres pour savoir si elle pourrait revendre ses titres de propriété à la New Zealand Company - mais pour cela il faudra d'abord que ces titres soient reconnus par la Couronne, tractations et péripéties qui dureront jusqu'en 1849. En attendant, Lavaud s'installe dans le provisoire, on construit des maisons de torchis, petit bourg qu'on baptise du nom pompeux de Philippeville, on plante des choux et des pommes de terre. Au début de 1842 une nouvelle corvette, l'Allier, remplace l'Aube, toujours sous le commandement de Lavaud. Il ne sera relevé qu'en Janvier 1843 à l'arrivée de la corvette Le Rhin - capitaine Bérard, un des grands explorateurs du Pacifique - avec à son bord un cadet de 1ère classe nommé Charles Meryon.


(1) Voir par exemple Steven Webster, Maori Hapu as a whole way of struggle 1840s-50s before the land wars. Sur le droit foncier coutumier maori et sa compréhension par les auteurs Pakeha (non-Maoris blancs) du XIXème siècle, lire le chapitre 8 de l'étude de Hazel Riseborough et John Hutton pour le Tribunal de Waitangi, The crown's engagement with customary tenure in the 19th century.


(2) et (3) Lettre de mission de Lord Normanby à Hobson, en date du 14 Août 1839.

(4) Selon Gibbon Wakefield, rapport au Select Committee for New-Zealand affairs du 17 Juillet 1840, cité par J. C. Andersen, "The mission of the Britomart at Akaroa".


(5) Peter Tremewan, French Akaroa, an attempt to colonize southern New-Zealand, pp. 94-95, cité et traduit par Nicolas Poirier, Les baleiniers français en Nouvelle-Zélande, p. 115.


(6) Lettre du capitaine Lavaud au ministre de la Marine, en date du 19 Août 1840, citée par Johannes C. Andersen, The mission of the Britomart at Akaroa.


(7) Rapport général du capitaine Lavaud, p. 30, Archives du Ministère de la Marine et des Colonies, A.N. BB4 1011, cité par Nicolas Poirier, Les baleiniers français en Nouvelle-Zélande.


Sources :


Johannes C. Andersen
, The mission of the Britomart at Akaroa, 1919. Andersen a dépouillé, entre autres, le journal de bord de Stanley et celui du magistrat anglais.


Jean Ducros
, Charles Meryon, officier de marine, peintre-graveur 1821-1868, Musée de la marine, Paris, 1968.


Nicolas Poirier
, les baleiniers français en Nouvelle-Zélande, Les Indes savantes éd., 2003. Nicolas Poirier prépare une thèse sur les baleiniers français; comme Ducros il a exploité les archives du Ministère de la Marine, notamment les lettres et rapports de Lavaud et Bérard.

Peter Tremewan
, French purchases in Banks peninsula, abrégé du rapport dans le cadre du Ngai Tahu Land report au Tribunal de Waitangi. Le livre de Tremewan, French Akaroa, an attempt to colonize southern New-Zealand, University of Canterbury press 1990, est malheureusement indisponible. C'est l'ouvrage de référence en langue anglaise.



13/01/2008

Façons de découper le temps et les baleines



1) Documentaire, sur fond musical (Whaling, British Instructional Films, 1924).





2) Expérimental. Depuis mille ans les Esquimaux Inupiats du nord de l'Alaska chassent la baleine pour se nourrir, les lois internationales leur accordant un contingent de 22 animaux par an. Jonathan Harris a documenté une de ces chasses en prenant 3.214 photos au rythme d'une photo toutes les 5 minutes, y compris pendant son sommeil. Parfois le rythme s'accélère, jusqu'à 37 photos par 5 minutes dans les séquences les plus dramatiques. Pour vivre, les Inupiats découpent la baleine, Jonathan Harris, lui, découpe le temps.


cliquer sur la baleine

Un affichage plein écran est préférable; en bas à droite, choisir un des trois modes d'affichage, mosaïque, timeline ou pinwheel. A partir de la page d'accueil du projet on peut glaner quelques explications, voir en particulier la partie "interface".

11/01/2008

Le greffe : La pointe courte

Réalisatrice : Agnès Varda, 1956



Elle est vraiment courte, et son chemin, plutôt secret


et mon enfance, plutôt proche


Au fait, on a republié le film. Et on peut aussi voir ici et ...

Tableaux parisiens